• Les victoires de M. Mélenchon et du Front de Gauche

    Où il s'agit de ne pas laisser une déception éclipser de belles victoires tant attendues, ni la résistible ascension du FN à contrer sans tarder.

    Le talent et la justesse de biens des propos de M. Mélenchon étaient à la fois si inattendus et attendus qu'ils provoquèrent en France et au-delà un fol espoir côté cœur. Un rêve très collectif où la sincérité et la détermination, le temps d'une campagne, effaceraient d'une magie rouge plusieurs décennies de recul, de démissions de la gauche, de ses représentants autant que de sa base, de ses électeurs.
    Le système électoral français et -tant que faire se peut- les électeurs ont tranché,
    l'alarme a sonné, la gravité a frappé et pourtant...

    Les militants, M. Mélechon lui-même et les instituts de sondages avaient placé la barre -et cet espoir- très haut. Parlant et partant d'une gauche qui au scrutin de 2007 peinait à rassembler un score bien moindre que celui remporté cette fois par le Front de Gauche, et à lui seul !
    Ramener les scores de l'ensemble de la gauche réelle -présentant un programme objectivement socialiste et/ou communiste- à plus de 10%, étant entendu que le PS en tant que parti n'en est plus jusqu'à preuve du contraire, est une des victoires objectives dont peut se targuer le Front de Gauche.
    Particulièrement dans les conditions actuelles et face aux manœuvres menées par l'implacable machine médiatique spectaculaire donc réactionnaire durant cette campagne faite de coïncidences extrêmes. Telles « l'affaire DSK » ou cette intrigante « affaire Merah » arrivant à point nommé; et sa suite d'arrestations ultra-médiatisées en forme d'appel pour les droites extrêmes, puisque l'UMP se meurt d'en être.

    L'objectif -proposé durant la campagne- par M. Mélenchon de déverrouiller ce spectacle politique cadenassé par le FN n'est malheureusement pas atteint. Au contraire le FN obtient son plus haut score jamais enregistré.
    Pourtant les électeurs et militants du FdG peuvent facilement dépasser cette légitime déception en imaginant un instant le score qu'aurait obtenu l'extrême droite s'ils et elles n'avaient pas enfin décidé de se rassembler et de résister, d'occuper le terrain, dans les têtes comme en rue.
    Car le moment n'est pas aux lamentations mais à l'action et surtout de ne plus quitter ni céder ce terrain enfin mais trop partiellement réinvesti.

    Le FdG a effectivement porté l'essentiel du combat contre le FN et son programme, fait qui est aussi alarmant que le score du FN. Ce parti qui n'est plus seulement banalisé ou « dé-diabolisé » mais ouvertement propulsé par le discours du président sortant et consacré par les médias privés et « publics »!
    Parmi les enseignements de cette campagne, en dehors du fait qu'un discours réellement à gauche est pertinent et nécessaire, un des principaux tient dans le rappel d'une évidence :
    Tant qu'un discours de gauche, intelligent et intelligible, critique et radical n'aura pas pleinement accès à des médias populaires massivement diffusés et consultés, espérer influer sur le système électoral français actuel -voir sur la politique à court et moyen termes- est illusoire.
    Le score du FN comme la percée puis le repli du FdG en sont une énième démonstration.
    Les gauches latino-américaines l'ont bien compris en créant Télé-Sur ou en multipliant les médias publics, régionaux d'information, d'éducation populaire et permanente.
    Fait notable, c'est le programme et candidat du FdG que plusieurs formations politiques qui gouvernent ces pays ont décidé de soutenir officiellement. Comme M. Mélenchon s'est employé à le répéter, ces pays ont déjà expérimenté le traitement que la finance et le FMI appliquent maintenant en Europe. C'est donc en connaissance de cause qu'ils apportent ce soutien. Voilà encore un motif de fierté pour le FdG, certains reçoivent le soutien de Mme Roussef d'autres de Mme Merkel.

    Revenons sur cette campagne médiatique française qui mis à part ses « extrêmes coïncidences » présente trois temps dans son approche du phénomène FdG et de son candidat.
    D'abord le déni, les médias français semblant jusqu'à ignorer l'existence du FdG et préférant s'intéresser au FN et son électorat. Entreprise de promotion du FN et de son « programme » déjà bien entamée par une série de provocateurs médiatisés et cautionnés par les plus grandes chaînes de médias, ainsi que par le discours du gouvernement sortant. Guéant ayant repris avec ardeur le nauséabond flambeau d'Hortefeux.

    Ensuite une grande partie des médias officiels décident de s'intéresser au Front de Gauche et son tribun. C'est qu'il devenait difficile d'ignorer un candidat qui déjà dépasse les « centristes », déplace des foules et semble menacer le FN. Mais aussi parce que M. Mélenchon a choisi de bannir toute langue de bois et de s'adresser à l'intelligence de ses interlocuteurs, journalistes et auditeurs, ce avec un talent d'orateur et une maîtrise rarement égalés. La jubilation positive de certains journalistes était patente face aux réponses du candidat. Sans parler des gens de gauche de France et d'ailleurs dont nombre d'entre eux n'espéraient plus avoir le plaisir d'écouter de tels discours en français de leur vivant.
    L'effet de cet intérêt des médias est immédiat, M. Mélenchon créant la surprise dans les sondages, suscite un nouvel espoir à gauche et une certaine inquiétude à droite. Démontrant ainsi à la fois qu'un discours intelligent et radical est nécessaire mais aussi la toute puissance des médias qui en temps normal ne répercutent pas ce type de discours et programme.

     
    "Si tu veux voir mes petits doigts , vote pour ..."

    Le dernier temps de cette campagne ne fut donc que retour à la normale. Rappel à l'ordre et M.Mélenchon de révélation redevient vite l'homme à abattre. Pire, les médias qui avaient provisoirement délaissé le FN s 'empressèrent d'en revenir au verrouillage par l'extrême droite, renforcée par la caution du président sortant et de son équipe ratissant tellement à l'extrême de la droite qu'ils en provoquent encore l'émoi jusque dans les rangs de leurs propres « camarades » Européens ou d'outre atlantique!
    Rappelons que dans d'autres pays européens l'extrême droite fait de tels scores que la droite classique après avoir instrumentalisé tente un peu tard d'éviter de se faire déborder!
    Il est évident que le FN doit beaucoup à Sarkozy et plus encore aux médias, tout autant qu'une partie de l'oligarchie a déjà opté pour ce néo-fascisme. Celui où se rencontrent cols bleus du FN et cols blancs de la finance libertarienne.

    Relevons cette autre victoire du FdG -non des moindres- qui consiste en une réhabilitation d'un véritable discours ancré à gauche. Connecté au réel, compréhensible par delà les convictions, porteur d'espoir, ne se cantonnant pas dans la critique et délivrant des pistes concrètes pour l'action.
    Le Front de Gauche peut aussi se targuer d'avoir autant que possible tiré cette morne campagne vers le haut. D'avoir imposé le politique, le débat de fond, des thématiques, propositions et objectifs réellement de gauche. Loin du sécuritaire, des courbettes à la finance, du halal, de la chasse aux assistés-sociaux tandis que les assistés-nantis pavanent, et autres provocations d'extrême bassesse.
    Il est aussi le seul parti ayant une telle audience à proposer une réelle sortie du cadre économique en le dénonçant et le combattant pour ce qu'il est : un choix politique et non une fatalité.
    La responsabilité des militants de gauche enfin de retour sur ces fronts est donc d'autant plus grande face aux défis et luttes à venir.
    Il est à espérer qu'après l'alarme qui vient de retentir ceux qui à gauche n'avaient pas encore rallié le FdG pourront enfin dépasser les divergences qui menèrent à cette attitude. Hier difficilement compréhensible -jusque dans leurs maigres rangs- et confinant aujourd'hui à l'inacceptable de la part de militants communistes sincères, car elles et ils le sont.

    Le Front de Gauche et M. Mélenchon par leur détermination, leur engagement et leurs talents ont réussi l'exploit de réveiller et de rassembler à gauche. Il serait ingrat de ne pas poursuivre et amplifier ce qui vient de se produire, la fierté et la combativité retrouvées; de multiplier ces premières avancées et victoires après des décennies de recul continu de la gauche sur tous les fronts!
    La prochaine doit être le départ de Sarkozy, quand bien même cela passe par un vote pour le candidat du PS.
    La lucidité n'empêche pas le pragmatisme, au contraire, de plus elle prémunit des déceptions.

    I.Vergado

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